Bin en fait c'est assez fréquent quant la lettre préfixe de la deuxième syllabe d'un mot di-syllabique est un 'a chung.
Assez fréquent, mais pas pour autant automatique.
Exemple : dge-'dun (
དགེ་འདུན་), le sanghâ, prononcé gèndün.
Ca sera automatique en revanche, quand, toujours dans le cas d'un di-syllabique, la lettre suffixe de la première syllabe, ainsi que la lettre préfixe de la deuxième syllabe, sont toutes deux des 'a chung.
Exemple : mka'-'gro-ma (
མཁའ་འགྲོ་མ་), dâkinî, prononcé k'andoma
Ca, c'est pour ce que j'ai dit plus haut. En fait, les nasales flottantes peuvent également être induites par d'autres lettres, toujours placées en lettre préfixe de la deuxième syllabe d'un mot.
Voici ce qu'en dit Nicolas Tournadre ; je recopie Tibétain Standard pages 349 et 350 et 351 pour que ce cours important sur la prononciation en tibétain reste sur le forum.
Ne pas hésiter à transférer ce message vers un topic plus approprié, qui traite de grammaire et autres, si besoin.
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On trouve notamment les préfixes 'a(
འ), ma(
མ), et la plupart des combinaisons comportant un L : zl(
ཟླ), ld(
ལྡ), lt(
ལྟ), lj(
ལྗ).
En outre, à titre exceptionnel, le l(
ལ), lorsqu'il apparaît à la finale de la première syllabe, peut aussi générer une nasale.
Les lettres préfixées 'a et m, ainsi que les combinaisons susceptibles de générer une nasale, seront appelés des "nasalisateurs". La nasale obtenue est dentale (n), labiale (m), ou vélaire (ng) selon le cas. Elle a en général le même lieu d'articulation que la consonne finale de la première syllabe ou que la consonne initiale de la seconde.
On trouve les cas de figure suivants :
Si le nasalisateur est précédé par la consonne /p/, celle-ci est nasalisée en /m/.
Exemples :
ཞབས་འདེགས::་ (zhabs-'degs) -> shap+nteg -> shamté : "service"
ཞིབ་འཇུག (zhi-'jug) -> ship+njug -> shimdjou : "recherche"
Si le nasalisateur est précédé par la consonne /k/, celle-ci est nasalisée en /ng/.
Exemple :
མིག་འཕྲུལ་ (mig-'phrul) -> mik+ntrü -> mingtrü : "illusion"
Si le nasalisateur est précédé par une consonne nasale, il n'y a pas de changement.
Exemples :
སྔོན་འགྲོ་ (sngon-'gro) -> ngön+dro -> ngöndro : "pratiques préliminaires"
སྨོན་འདུན་ (smon-'dun) -> smön+dün -> möndün : "souhait"
Si le nasalisateur est précédé par une voyelle ou un allongement (dû à un r ou à un l), il génère une consonne nasale qui dépend du lieu d'articulation de la consonne suivante, c'est-à-dire la consonne initiale de la deuxième syllabe. On rencontre les cas suivants :
- Lorsque le nasalisateur est suivi d'une consonne /p/, il génère la nasale /m/.
Exemples :
དཔལ་འབར་ (dpal-'bar) -> pèl+nbar -> pèmbar (c'est un prénom)
དམའ་འབེབས་ (dma'-'bebs) -> maa+npèb -> mampèb : "mépris"
Parfois, la labiale n'est présente que dans l'orthographe sous la forme d'un b :
Exemples :
ཤ་འབྲས་ (sha-'bras) -> sha+ndré -> shamdré : "ragoût de yak ou de mouton"
- Lorsque le nasalisateur est suivi par une consonne /t/, /ts/, ou /c/, il génère une nasale dentale /n/ :
Exemples :
དགེ་འདུན་ (dge-'dun) -> gè+ndün -> guèndün : le sanghâ
མི་འདུག (mi-'dug) -> mi+nduk -> minduk : "inexistant"
བོད་ལྗོངས (bod-ljongs) -> pö+djong -> pöndjong : "Pays de Böd" (le Tibet, la RAT)
- Lorsque le nasalisateur est suivi par une consonne /k/ ou /ky/, il génère une nasale vélaire /ng/ :
Exemples :
དུས་འཁོར་ (dus-'khor) -> dü+nk'or -> dünk'or : "cycles du temps"
གསར་འགྱུར་ (gsar-'gyur) -> sar+ngyur -> sangyur : "nouvelles"
Cependant, dans le cas où la nasale est due au préfixe m, c'est ce son qui apparaît en général quelle que soit la consonne suivante :
རྒྱུ་མཚན་ (rgyu-mtshan) -> gyu+mtsèn -> Gyumtsèn : "raison"
Ces nasales sont dites "flottantes" dans la mesure où elles ne sont pas toujours obligatoires, surtout dans le registre soigné et à la lecture. En revanche, elles apparaissent presque toujours dans la conversation courante.
Ainsi, on on entendra pour
རྒྱ་མཚོ་, "océan", aussi bien kyamtso que kyatso ; pour
རྒྱུ་མཚན་, "raison", kyumtsèn ou kyutsèn.
Toutefois,
སྐུ་ཟླ་, "époux", est toujours prononcé kunta et non kuta. De même,
རྒྱལ་རྩེ་, "ville de Gyantse", gyantsé mais pas gyatsé ;
དགེ་འདུན་, "sanghâ", gèndün mais pas gèdün. Signalons au passage que les lettrés ne sont généralement pas conscients de prononcer ces nasales flottantes qui n'ont pas été décrites par la grammaire traditionnelle, ni par les ouvrages les plus récents.
Exemples :
Avec zl, ld, lt, lj ou l :
བོད་ཟླ་, /pönda/ : "mois lunaire"
ད་ལྟ་, /danta/ : "maintenant"
དཔལ་ལྡན་, /pèndèn/ : "Pèndèn (nom de personne)"
སྟོབས་ལྡན་, /tomdèn/ : "dépeceur" (de cadavres)
ཡུལ་ལྗོངས་, /yündjong/ : "paysage"
འབྲས་ལྗོངས་, /drèndjong/ : "Sikkim"
ཡལ་ག, /yèka/ ou /yènka/ : "branche"
དགའ་ལྡན་, /gandèn/ : "Gandèn (nom d'un grand monastère près de Lhassa)".
Avec le préfixe 'a :
གསོལ་འདེབས་, /söndèp/ : "prière"
དུད་འགྲོ་, /dündro/ : "animal"
ཞིབ་འཇུག, /shimdju/ : "recherche"
འཐབ་འཛིང་, /thamdzing/, "lutte"
སྐུ་འབུམ་, /kumbum/ : "Kumbum (grand monastère en Amdo)"
ཡར་འབྲོག་གཡུ་མཚོ་, /yamdrok yumtso : "lac Yamdroyumtso"
བདག་འཛིན་, /dangdzin/ : "égoïsme " (litt.: "la saisie du soi")
སྐྱབས་འགྲོ་, /kyamdro/ : "refuge"
ཁ་འདོན་, /k'andön/ : "réciter des prières"
ཞལ་འདེབས་, /shèndèp/ : "offrande", "contribution"
ཞབས་འདེགས་, /shamdèp/ : "service"
རྟེན་འབྲེལ་, /tèmdrèl/ : "signe efficient (introduisant un effet bénéfique)", "cérémonie".
Avec le préfixe m :
རྒྱལ་མཚན་, /gyantsèn/ : "bannière"
སྐུ་མདུན་, /kundün/ : "la présence" (litt.:devant le corps, titre du Dalaï-Lama)
ཕྱག་མཛོད་, /changtsö/ : "trésorier"
ལྷ་མཛེས་, /lhandzé/ : "belle déesse (nom de personne)"
ལོ་མཚོད་, /lomtchö/ : "commémoration de la 1ère année de la mort".
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Voilou, rien que ça
On s’aperçoit donc de l'étendue que peut prendre cette "nasale flottante", et aussi de la fréquence de sa rencontre. Mais n'ayez pas peur du tout : ça devient un automatisme très très vite.